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Till, le roi Philippe et l'âne

Marco Valdo M.I.
Langue: français



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Till, le roi Philippe et l'âne

Chanson française – Till, le roi Philippe et l'âne – Marco Valdo M.I. – 2015

Ulenspiegel le Gueux – 9

Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
Christ


Nous voici, Lucien l’âne mon ami, à la neuvième canzone de l’histoire de Till le Gueux. Les huit premières étaient, je te le rappelle :

01 Katheline la bonne sorcière Katheline, la bonne sorcière (Ulenspiegel – I, I)
02 Till et Philippe Till et Philippe(Ulenspiegel – (Ulenspiegel – I, V)
03. La Guenon Hérétique La Guenon Hérétique(Ulenspiegel – I, XXII)
04. Gand, la Dame Gand, La Dame(Ulenspiegel – I, XXVIII)
05. Coupez les pieds ! Coupez les pieds !(Ulenspiegel – I, XXX)
06. Exil de Till Exil de Till(Ulenspiegel – I, XXXII)
07. En ce temps-là, Till En ce temps-là, Till(Ulenspiegel – I, XXXIV)
08. Katheline suppliciée Katheline suppliciée(Ulenspiegel – I, XXXVIII)

Je profite de l'occasion pour faire remarquer cette numérotation particulière que je viens d'introduire : (Ulenspiegel – I, I), laquelle signifie très exactement ceci :
Ulenspiegel : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs, dans le texte de l'édition de 1867.
Le premier chiffre romain correspond au numéro du Livre – le roman comporte 5 livres et le deuxième chiffre romain renvoie au chapitre d'où a été tirée la chanson. Ainsi, on peut – si le cœur vous en dit – retrouver le texte originel et plein de détails qui ne figurent pas ici.

C'est une fort bonne idée, dit Lucien l'âne. Je me demandais d'ailleurs comment savoir où trouver tous ces renseignements… Pour le reste que dit la chanson…

Comme tu t'en souviens certainement, Till et Philippe – il s'agit du roi Philippe – ont un rôle capital et antagoniste dans le récit imaginé par Charles De Coster, il y a près de 150 ans, déjà. Ils sont les deux pôles qui vont orienter toute cette histoire, elle-même assez complexe, tant elle entremêle de récits, de personnages et d'événements divers. On peut la lire de mille façons, sans doute. Mais ici, dans Ulenspiegel le Gueux, il s'agit essentiellement de l'affrontement entre le pouvoir et la liberté ; il est question aussi du véritable combat que mène l'Église conter la libre-pensée. Quant à Till et Philippe, ils seront cette fois encore les acteurs principaux. J'ai dit « cette fois encore », car il t'en souviendra, la première fois qu'on les mit en présence ici, c'était pour leurs naissances respectives et la chanson s'intitulait : « Till et Philippe ». Revoici donc une nouvelle rencontre, mais elle est bien différente, car Till et Philippe vont se voir et même, se parler.

Si c'est bien la rencontre à laquelle je pense, je crois bien que c'était à Anvers et figure-toi, que j'étais moi-même présent et bien placé pour en connaître.

Je me disais justement que ce devait être toi, cet âne qui accompagnait Till dans ses déambulations anversoises. Je pensais en écrivant cette chanson que cette entrée de Till à Anvers sur le dos d'un âne semblait avoir inspiré le peintre ostendais James Ensor pour son Entrée du Christ à Bruxelles, scène elle-même manifestement aussi liée à l'Entrée du Christ à Jérusalem, toujours sur le dos d'un âne.

J'y étais, j'y étais… Dans tous les cas, on ne saurait nier l'importance de l'âne en cette folle journée. Personnellement, j'en ai gardé un merveilleux souvenir. On a traversé la ville de part en part et je me vois encore allant rigolard avec Till sur mon dos et le valet qui court à mes côtés, tenant la bride. Et puis, ce qui s'est finalement passé sur la place avec tous ces gens.

Écoute, Lucien l'âne mon ami, laisse-moi quelques instants pour recadrer cette scène d'anthologie et en exposer les tenants et les aboutissants. Au début, on a donc, d'un côté, Till qui joue au fou à Bois-le-Duc, d'où sa réputation l'avait précédé jusqu'à Anvers, d'où on envoya le chercher. D'autre part, on a Philippe – entretemps, marié à la Reine d'Angleterre est devenu roi consort, sans aucun pouvoir personnel, ne « régnant » que par l'entremise de sa femme. Un fait difficile à accepter pour un Très Grand d'Espagne… Il s'en est d'ailleurs plaint à son père Charles Quint et ce dernier lui a promis qu'il se retirera bientôt et lui cédera sa place. En attendant, Philippe fait le tour de ses futures possessions. Il est reçu en grande pompe partout et partout, il promet ce qu'on voudra et qu'il en tiendra pas. Son entrée à Anvers condense donc toute cette équipée. Mais à Anvers, c'est le sens de la chanson, Till va lui montrer en même temps qu'au peuple assemblé combien leur jeu de dupes est ridicule et fonctionnez sur une immense crédulité (du peuple) et sur une immense hypocrisie (du futur roi). Et la chanson raconte fort bien tout ça…

Alors, passons à la chanson et puis, reprenons notre tâche et tissons le linceul de ce vieux monde prometteur de beaux jours, d'avenirs radieux, de paradis futurs, crédule, croyant et cacochyme.

Heureusement !

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
« Pèlerin pèlerinant ne peut follier de séjour
Seulement par auberges et chemins »
Être fou, je veux bien, mais sans aucun détour
Car pluie ou soleil, chez moi, me ramène mon destin.

Philippe, triste roi consort d'Angleterre,
S'en vînt visiter son prochain héritage :
Hainaut, Brabant, hollande, Zélande et Flandres.
Il vivait à ce moment en son plus bel âge.

Froid était son royal visage
Roide était sa tête louche
Étroit son torse et torses ses jambes
Roide son parler pâteux de laine en bouche

Partout ce ne fut que festoiement
Partout il jura de maintenir les libertés civiles
Mais on vit bien à Bruxelles son faux serment
Sa main se croqua soudain sur l'évangile.

À Anvers, pour un triomphe et force fêtes,
On dépensa tant et plus et plus encore.
Pour le roi, on fit carnavals et cortèges.
Rien n'y fit, Philippe tirait une tête de mort.

La ville fit quérir un fol à Bois-le-Duc.
Connais-tu un tour pour faire rire Philippe le roi ?
Heer Markgrave, j'en tiens plus d'un trempé dans le suc.
Que comptes-tu faire ? Voler en l'air, une fois.

Par les rues, les places, les carrefours, on clama
Sonnant clairons, battant tambours, à haute voix
Aux signorkinnes, aux signorkes, on annonça
Le fol Ulenspiegel sur la place volera.

Till sur son âne, toute la ville, traversa
En robe cramoisie donnée par la commune.
Till et son âne, ornés de grelots et de soie,
Saluèrent bien bas le roi sur son estrade.

Till sur le toit, corneille sur la corniche,
Battait l'air de ses bras, mais il ne volait pas.
Là, il déclara à la foule et au roi :
Je me croyais seul fou, la ville en est pleine.

envoyé par Marco Valdo M.I. - 28/10/2015 - 23:50




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