Tränen des Vaterlandes / Anno 1636
Andreas GryphiusTraduzione francese di Michel Chasteau (Harmonia Mundi) da France Musique | |
LES LARMES DU PAYS / ANNO 1636 | LARMES DE LA PATRIE |
Nous sommes finalement dévastés complètement, entièrement ! Le peuple en foule déchaînée, les sacquebutes en délire Les épées gluantes de sang, les couleuvrines tonnant Ont dévoré toute la sueur, le travail et les réserves. | Nous voici dévastés, Ruinés, et plus encore ! Les cohortes impies, La trompette furieuse, L'épée grasse de sang, Le canon rugissant, Ont réduit à néant Le fruit de tant d'efforts et de tant de sueur. |
Les tours se dressent dans les lueurs, l'église est anéantie. Le Rahthaus gît en capilotade, les forts sont détruits. Les filles sont violées, et par tout le pays, Le feu, la peste et la mort transpercent le cœur et l'esprit. | Nos tours sont incendiées, Renversées nos églises, A terre le beffroi, Nos vaillants massacrés Et nos filles souillées, Et partout à l'entour Flammes, et peste, et mort, Navrant les coeurs et les esprits. |
Ici, des fortifs et de la ville, le sang frais sans arrêt s'écoule. Cela fait déjà trois fois six ans que le flux de notre fleuve, Presque bouché par les cadavres, lentement se pousse. | Par les remparts, la ville, Coule toujours le sang ; Voilà trois fois six ans Que fleuves et rivières, De cadavres remplis, S'écoulent à grand-peine. |
Et je ne dis rien de ce qui est pis que la mort, Plus terrible que la peste, le feu et la faim, encore, Qu'à nombre de nous, même de l'âme fut dérobé le trésor | Mais je tairai le pire, Plus amer que la mort, Plus affreux que la peste Et le feu et la faim : Que tant, par la violence, Du salut de leur âme aient fait le sacrifice. |