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Moody's Blues

Marco Valdo M.I.
Langue: français


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Moody's Blues

Chanson française – Moody's Blues – Marco Valdo M.I. – 2012


borsa


Mon ami Ventu, qui a de l'imagination à revendre... Qu'attend-t-il pour le faire ? Qu'attend-t-il pour vendre les fruits de son imagination aux plus offrants... mais le diable sans doute a déjà pris option. Pas touche, crie le diable, Venturi est mon ami. Dès lors, cher ami le diable, voici l'affaire, voici le drame... notre ami Ventu s'est vu dégradé par Moody's, lui et son chat et même, le pâté pour le félin.

Oh, dit Lucien l'âne, voilà qui est grave. Dégradé, par Moody's... En voilà une histoire...

Ça a l'air terrible comme ça et tout le monde, maintenant, le regarde de travers. Mon ami Ventu... Ils veulent lui faire manger la boîte de pâté pour le chat, une mousse de poulet et de saumon. Mais j'espère quand même que la mousse est saine.

Et oui, Lucien l'âne mon ami, bien sûr... Mais quand t'es dégradé comme ça, quand on dégrade un pays entier... D'un coup, il n'y a plus personne dans les restaurants... Pour l'instant, il reste les boîtes du toutou ou du félidé. Pour combien de temps encore ? Après, ce sera les croquettes... et après les croquettes ? Plus rien.

Bah, dit Lucien l'âne en ouvrant tout grand son énorme bouche... Nous les ânes, on nous laisse à peine du son ou de la paille... Quand on nous laisse quelque chose... Je vais te dire comment tout cela va finir, si on les laisse faire... les riches et leurs sbires. J'ai connu un âne, il s'appelait Martin. Le pauvre. Il avait un maître, un propriétaire qui voulait faire des économies... Et pour ce faire, pour satisfaire aux exigences de ses créanciers, il a réduit la nourriture de l'âne, moins de son, presque plus de foin. Finalement, il ne restait que de la paille... Le maître se réjouissait, l'âne coûtait de moins en moins, sa ration se réduisait à presque rien, à rien et puis, à moins que rien.

Et puis, qu'arriva-t-il, Lucien l'âne mon ami ?

Oh, tu sais, Marco Valdo M.I., le maître disait, très content, quel âne miraculeux, il s'adapte, il s'habitue aux régimes les plus stricts... Et un matin, l'âne, mon ami Martin., qui ne sentait plus la faim, qui s'habituait si bien à subir, subir encore... L'âne s'est couché. Un peu après quand le fermier est venu... L'âne Martin, au matin, tout simplement est mort... d'inanition. Quel horrible destin... Et , je pense bien que c'est ce qui arrive aux Grecs... Aux Grecs pauvres, car les Grecs riches, ils s'en foutent... Il ne leur arrivera rien...Ils se sentent bien à l'abri de la faim et de la colère des pauvres. Du moins, ils le croient. Ils ont la presse, l'armée, la police, les fusils, les chars... mais qui vivra (vivre : zein, en grec), verra.


Maintenant, Lucien l'âne mon ami, voici deux trois notes pour comprendre la chanson que j'ai tirée de ce récit de Riccardo Venturi. Dans le petit refrain, on trouve les Moody Blues – tu sais ceux qui chantaient:

« Why do we never get an answer
When we're knocking at the door
With a thousand million questions
About hate and death and war? »


(Pourquoi ne recevons-nous jamais de réponse- quand nous frappons à la porte – avec des milliions de questions – à propos de la haine et de la guerre). On y trouve aussi Z et Zein... c'est évidemment le « Z » du verbe « Zein » grec, de la révolte de Lambrakis et incidemment du film de Costa-Gavras et déjà, musique de Théodorakis. Rappelle-toi, à ce moment Mikis était (encore une fois) en prison. Quant au « Sein... » del'expression « Muss es sein... », là, c'est Beethoven et bien entendu, Léo Ferré. Et le Magouilles blues, c'est une merveilleuse chanson du bon François Béranger... Une chanson qui parle – entre autres – des élections...

Ah oui, ces élections, piège à cons ! En fait, comme je comprends la chanson... C'est une illustration de la Guerre de Cent Mille Ans que les riches font aux pauvres et de la manière dont les riches s'y prennent pour imposer leur dictature, pour rendre le travail obligatoire, pour privatiser le monde, pour exploiter les choses, les plantes, les animaux et les gens...

Tu sais, Lucien l'âne mon ami, je pense que l'humanité est malade de la richesse. Les riches sont le cancer du monde... Vue comme ça, l'humanité est remplie de métastases... Pour un peu, elle sera en phase terminale.

Sans aucun doute. C'est même pour ça que nous devons sans jamais nous lasser de tisser le linceul de ce vieux monde dollarisé, métastasé, empoisonné et cacochyme.

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Moody's blues !
Nous sommes tous des ZZZ
Zein, zein, zein
Zen, zen, zen... ZZZ
Muss es sein ! Es muss sein !
Mousse est zein
La mousse est saine
Pour le chat
Et pour moi
Magouilles blues...
Moody's blues...

Matin, matinée ordinaire
Réveil à six heures ,
Pause du matin, mots croisés
Douche, bouffe au chat, café,
Dans la boîte aux lettres, un pli,
Sur l'enveloppe : Moody's.
"Moody's m'écrit?",
Pour sûr, une erreur;
Non, il n'y a pas d'erreur
C'est Moody's, l'agence de notation
Qui m'envoie ma cotation.
Un courrier express
Pour moi, à mon adresse
Pas d'erreur, pas de doute
Des papiers, un tas de notes
J'y comprends rien
À tout leur machin.

Moody's blues !
Nous sommes tous des ZZZ
Zein, zein, zein
Zen, zen, zen... ZZZ
Muss es sein ! Es muss sein !
Mousse est zein
La mousse est saine
Pour le chat
Et pour moi
Magouilles blues...
Moody's blues...

Au nom de l'agence Moody's,
Charles Sharkson me dit
Cher M. Venturi,
C'est la crise dans le pays
Et votre situation est merdique
On vous a choisi
Comme représentant typique
De la classe des pauvres relégués
À la note ZZZ et dès maintenant
Vous êtes officiellement
Dans la merde, déclassé
Rétrogradé, dégradé.

Moody's blues !
Nous sommes tous des ZZZ
Zein, zein, zein
Zen, zen, zen... ZZZ
Muss es sein ! Es muss sein !
Mousse est zein
La mousse est saine
Pour le chat
Et pour moi
Magouilles blues...
Moody's blues...

Je suis déclassé,
Mis au rebut, dégradé
Moody's m'a dégradé
Vous allez tous être déclassés
Nous allons tous être dégradés
Comme des Grecs, comme des Grecs
Même le chat, même le Rebelchat.
Sa boîte à chats bouffée par les Grecs
Sa boîte de pâtée bouffée par moi.

Moody's blues !
Nous sommes tous des ZZZ
Zein, zein, zein
Zen, zen, zen... ZZZ
Muss es sein ! Es muss sein !
Mousse est zein
La mousse est saine
Pour le chat
Et pour moi
Magouilles blues...
Moody's blues...

envoyé par Marco Valdo M.I. - 18/2/2012 - 14:27


Voici le texte de Riccardo Venturi, traduit par Marco valdo M.I. C'est ce texte qui a servi de fondement à la chanson "Moody's Blues". On constatera (même traduit) que notre ami Ventu, bien que dégradé par Moody's, a conservé une belle forme littéraire et imaginative.

Saluons-le avant ue Moody's ne le dégrade encore ou n'exige carrément sa relégation au fond de la Lucanie... Comme l'on fit vers 1935 à Carlo Levi...


La Classe ZZZ.
Par Riccardo Venturi

Version française Marco Valdo M.I. du texte Degradato, publié sur le blog Ἐκβλόγγηθι Σεαυτόν Asocial Network

Jeudi, 16 février 2012.
Ce matin ressemblait à une matinée comme toutes les autres.

Le réveil à six heures et quart, le caca du matin avec la Semaine Énigmatique, la douche, le café, la bouffe au chat; et non, ce n'est pas parce que je parle toujours de crise du capitalisme et de guerre civile en Grèce, que je me réveille en sortant les molotovs du frigo, ou en préparant une insurrection à l' Isolotto. Par contre, dans la boîte aux lettres, le courrier languissait déjà. Quand, en allant prendre la voiture dans le parking avec le froid polaire habituel, j'ai aperçu le pli, j'ai eu un sursaut: sur l'enveloppe, on voyait l'inscription Moody's.


"Moody's m'écrit?", j'ai pensé; putain, comme je suis devenu important ! Ou, pour sûr, ce sera une erreur; ou ce sera encore la célèbre Moody's, maison de vente par correspondance, qui m'envoie son catalogue. J'ai pris l'enveloppe et j'ai eu un nouveau sursaut: non, non, c'était vraiment Moody's, le vrai. L'adresse ne laissait pas place aux doutes: Mr Ricardo Venturi, (évidemment, ils avaient omis le double « c » de Riccardo...; et puis ce sont des économistes et ils auront eu à l'esprit David Ricardo), rue de l'Argingrosso 65c, I-50142 Florence Italy. Je n'ai pas résisté à l'émotion; malgré les sept degrés sous zéro, ou quelque chose du genre, j'ai posé mon sac à terre, avec mauvaise grâce, et j'ai déchiré l'enveloppe.

Elle contenait un tas de calculs et de chiffres auxquels je ne comprenais évidemment rien du tout; tout de même, il y avait aussi heureusement une gentille lettre d'accompagnement, dans laquelle Mr Charles Sharkson, au nom de l'agence Moody's, me communiquait ce qui suit:


Cher M. Venturi,

Comme vous savez certainement, en raison de la crise persistante de l'Italie, notre Agence a décidé de soumettre un certain nombre de citoyens italiens, choisis sur des bases diverses, à une évaluation approfondie. Vous avez été choisi comme un représentant typique de la classe « WWW », du fait que votre situation financière est proche de la merde. D'une analyse plus approfondie, il ressort que votre statut de WWW précédent ne peut pas être maintenu désormais. Ainsi, il est de mon devoir de vous informer que vous avez été rétrogradé à la classe ZZZ, c'est-à-dire que vous êtes maintenant officiellement dans la merde. Nous vous rappelons l'importance de votre inclusion dans cette classe de base, car votre pauvreté réelle nous permettra de vous transformer en objet d'une analyse plus profonde pour mieux contrôler les effets de la crise italienne sur des citoyens standards, qui vont être étiquetés maintenant "Standard and Poor" (standard et pauvre) (nous avons le plaisir de montrer un certain degré d'humour à la mode). Acceptez s'il vous plaît nos respects les plus aimables, Charles A. Sharkson, Département d'Évaluation personnelle.

Je me suis appuyé au mur, en proie à l'angoisse. Pire qu'un infarctus. Putain, je le savais bien tout seul que ma situation financière est constamment au bord du gouffre , et je m'y suis habitué au cours de ma vie; aussi pour cela, à moi, la crise au fond m'indiffère. Depuis neuf cents ans, je suis en crise; et je revendique orgueilleusement mon statut qui m'a permis de vivre ma vie de chien comme il m'a toujours plu, en réussissant d'autre part toujours à flotter on ne sait comment. Des périodes d'économie de pure subsistance, d'expédients, des montants fous dépensés en livres (Pardonnez-moi, mais je n'ai pas de dépenses militaires!), la moitié de mon budget actuel absorbée par la nourriture pour chats, christs et madonnes, quelques prémolaires pre-cariées, jus de brocolis et anchois, une Fiesta avec 300.000 km au compteur , même pas à moi, sinon j'irais à pied, et d'autres choses; mais que Moody's me choisisse comme « typical respondent », je ne m'y serais jamais attendu. Je menais ma vie, pour une grande part à l'écart et souterraine, et je ne savais pas que quelque part ils m'avaient placé dans la WWW Class, (je ne suis même pas un site internet). Je prenais les repas à quatre euros du CPA, et je ne savais pas que Mr Sharkson était en train de me communiquer officiellement que j'étais dans la merde. Et qu'il y avait Moody's pour me le dire!
En somme, vous l'aurez enfin compris, ils m'ont dégradé. Je ne cache pas que, d'une certaine manière, j'éprouve même un peu d'orgueil légitime; fichtre, au même niveau qu'un État, une région, un organisme local ! J'achèterai demain le journal et je lirai en première page : Moody's dégrade Venturi ? Je serai dans la merde, mais deux euros pour un cadre chez le papetier du coin, je peux encore me les permettre. Je deviendrai une célébrité dans le quartier, à moins que Moody's n'ait frappé aussi ailleurs dans l'Isolotto. Et, tout compte fait, il vaut mieux ainsi que de recevoir une enveloppe d'Equitalia ou de la Recette des Impôts ! Il est sûr maintenant que Moody's n'épargne personne. D'abord l'Italie et les États; puis les régions, les provinces et les villes, le rating de Borgo a Buggiano, l'ASL n° 6 Val de Cornia passé BB2, la fourrière de Fivizzano déclarée insolvable; en dernier ressort, il s'en prend à nous. Ils sont en train de nous contrôler le rating, à moi, à toi, à tous.

Après m'être repris un peu, et avoir accepté mentalement ma nouvelle situation de Pauvre de la Classe ZZZ, je suis rentré chez moi pour déposer l'enveloppe; je ne pouvais certainement pas la traîner avec moi pendant que je faisais le tour des Services Sociaux. Et que dirais-je à ces garçons? Oh, est-ce que vous le savez qu'ils ont dégradé le rating de votre chauffeur? Et à la Marinella qui vient me faire le ménage, je dis quoi ? Oh, à partir de maintenant, je te donne dix-huit euros et soixante-cinq centimes au lieu de vingt, je dois m'ajuster à ce que Moody's me recommande! J'ai enfin ouvert la porte et le chat Redelnoir m'a accueilli avec un "miaou" convaincu. Je lui ai pris une boîte, et pendant que je l'ouvrais, je me suis aperçu qu'il était écrit : Mousse de poulet et de saumon. Chicken and salmon spread. Putain. Le spread, même pour le chat. Et derrière la boîte, pour confirmer, il y avait la traduction en grec: Με κοτόπουλο και σολωμό. - sauf qu'à présent, en Grèce, ce sont les gens qui mangent la boîte du chat). On n'y coupe pas. Il faudra faire la lutte de classes, mais de classe ZZZ!

Publié par Venturik

Marco Valdo M.I. - 18/2/2012 - 19:22




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