Lingua   

Le couteau

Théodore Botrel
Lingua: Francese


Théodore Botrel


Pardon, monsieur le métayer
Si de nuit je dérange,‎
Mais je voudrais bien sommeiller
Au fond de votre grange?‎
Mon pauvre ami, la grange est pleine
Du blé de la moisson,‎
Donne-toi donc plutôt la peine
D'entrer dans la maison!‎

Mon bon monsieur, je suis trop gueux,‎
Quel gâchis vous ferais-je!‎
Je suis pieds nus, sale et boueux
Et tout couvert de neige!‎
Mon pauvre ami, quitte bien vite
Tes hardes en lambeaux:‎
Pouille-moi ce tricot, de suite
Chausse-moi ces sabots!‎

De tant marcher à l'abandon
J'ai la gorge bien sèche,‎
Mon bon monsieur, baillez-moi donc
Un grand verre d'eau fraîche!‎
L'eau ne vaut rien lorsque l'on tremble,‎
Le cidre… guère mieux:‎
Mon bon ami, trinquons ensemble,‎
Goûte-moi ce vin vieux!‎

Mon bon monsieur, on ne m'a rien
Jeté le long des routes,‎
Je voudrais avec votre chien
Partager deux, trois croûtes!‎
Si depuis ce matin tu rôdes,‎
Tu dois être affamé
Voici du pain, des crêpes chaudes,‎
Voici du lard fumé!‎

Chassez du coin de votre feu
Ce rôdeur qui ne bouge.‎
Etes-vous "Blanc"? Etes-vous "Bleu"?‎
Moi, je suis plutôt "Rouge"!‎
Qu'importent ces mots: République,‎
Commune ou Royauté":‎
Ne mêlons pas la politique
Avec la charité!‎

Puis, le métayer s'endormit,‎
La minuit étant proche.‎
Alors, le vagabond sortit
Son couteau de sa poche.‎
L'ouvrit, le fit luire à la flamme,‎
Puis, se dressant soudain,‎
Il planta sa terrible lame
Dans… la miche de pain!‎

Au matin jour le gueux s'en fut
Sans vouloir rien attendre
Oubliant son couteau pointu
Au milieu du pain tendre:‎
Vous dormirez en paix, ô riches!‎
Vous et vos capitaux,‎
Tant que les gueux auront des miches
Où planter leurs couteaux!‎



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