Dall'ultima galleria
Alessio LegaVersion française de Riccardo Venturi (2004). | |
FROM THE LAST TUNNEL | DU DERNIER TUNNEL |
Then, from the last railway tunnel the sun doesn’t seem to shine anymore and when it glistens on the background of the rusty railway line From the big widow’s tripes straight onto a high wall, and then the station, like trembling, vomits you down in Genoa… When I am back in Genoa, as first after the ritual cup of coffee on the station square, I’ll tread my sleeping steps from the kiosk to reconquer the dignity of myself living in this world and the duty of carrying my head high looking at the end | Et puis, du dernier tunnel le soleil ne semble plus jamais se rouvrir et quand il brille à l’arrière-plan sur le chemin de fer tout rouillé des entrailles de la grande veuve juste en face d’une muraille Porta Principe en sursaut te vomit soudainement sur Gênes... Moi, quand je reviendrai à Gênes, d’abord avec un p’tit caf’ rituel sur la place de la Gare, du kiosque avec mes pas endormis je partirai pour réconquerir ma dignité d’homme dans ce monde et mon devoir de marcher la tête haute mais en regardant vers le fond |
Looking at the end, looking at the sea, at the point still on the abyss, seeing everything coming back, crying, my head nailed to a fixed idea, a broken front, a divided front, a fountain drowning in St Patrick’s well of the red sea of our popular blood that’s choking in the ravine, that’s choking in the ravine… | vers le fond, regarder la mer, regarder le point fixe sur l’abîme tout voir, retourner, crier, hurler, le front brisé par une idée fixe le front brisé, le front divisé, fontaine qui se noie au puits de St. Patrice de la mer rouge, de notre sang populaire qui étouffe dans le précipice, qui étouffe dans le précipice |
When we are back in Genoa, we’ll ride back on the white crest of the wave breaking on the breakwater that eats up the night and shakes the sense of present, of memories crashing down when Genoa turns again into that of July nineteen sixty | Quand nous reviendrons à Gênes, nous le ferons au bout de la crinière blanche de la vague qui se rompt sur le brise-lames qui mange le soir et sécoue le sens du présent, de la mémoire qui se brise quand Gênes redeviendra le Gênes de juin soixante |
When we are back in Genoa, and when Genoa is back, when I am back, I come back to our winter, resistance will be declared when we find back our heart and all our feelings in this hell and we’re carried on nature’s arms, carried on the four elements… | Quand nous reviendrons à Gênes et quand Gênes sera revenue moi quand je reviens, c’est à notre hiver, la résistance sera déclarée quand, dans tout cet enfer-là, nous retrouverons nos sentiments nous viendrons au bras de la nature, nous viendrons sur les quatre éléments... |
Who are we? Now we are the sea, the black sea that’s unchaining, that’s pouring up on the harbor, onto the bastards that empoison it, the saltiest sea that you have made us breath up and cry, so give a kiss to your smokebombs, just before drowning | Qui sommes-nous? Nous sommes la mer, la mer noire qui se déchaîne et se renverse sur le port, sur le port qui l’empoisonne, et c’est une mer bien plus salée que vous nous avez fait pleurer, faites la bise à vos lacrymos juste avant de vous noyer |
Who are we? Now we are the wind that you can’t detain anymore, air free from grinding mills and from assembly lines, the wind that’s sweeping away, that’s erasing even your footprints, that’s breaking down walls and bars, unchaining through Marassi | Qui sommes-nous? Nous sommes le vent que vous ne pouvez plus prendre en ôtage air libérée des moulins et des chaînes de montage le vent qui balayera, effacera la trace de vos pas, qui écrasera les murs et les barres en se déchaînant sur Marassi |
Who are we? Now we are the fire that you haven’t never quenched, the fire burning down in the eyes of this grey city mall, the fire that shortcircuits the cables of alarms and of prohibitions while we are spreading salt on the ruins of Bolzaneto | Qui sommes-nous? Nous sommes le feu que vous n’avez jamais dompté, le feu qui brûle au fond des yeux de ce gris supermarché le feu qui court-circuite les fils de l’alarme et de l’interdiction tandis que nous répandrons du sel sur les ruines de Bolzaneto |
Who are we? Now we are the night, the lost moon of the desperate, the poet says: When a man falls, the markets soon rise up and for this man of eternal night, for this light fading away we’re waiting for the sun to melt the black bloc in our heart… | Qui sommes-nous? Nous sommes la nuit, la lune perdue des désespérés, le poète dit “Quand un homme tombe, c’est les marchés qui se rélévent” et pour cet homme de nuit éternelle, pour cette lumière qui va s’éteindre nous attendrons jusqu’à quand le soleil ne fonde le bloc noir dans notre coeur... |
And so we are back in Genoa, so we are back in Genoa, so we’re freeing Genoa, so we are free in Genoa… | C’est comm’ ça qu’on reviendra à Gênes, comm’ ça qu’on reviendra à Gênes et c’est comm’ ça qu’on libérera Gênes, comm’ ça qu’on sera libres à Gênes... |
When I am back in Genoa, as first after the ritual cup of coffee, the old samovar of sadness boiling as water in the air I breathe, this pain that has betrayed me, the giant profile of mourning, my sorrows that I can’t hide and these tears I’m holding firmly… And in a free Genoa, without barriers, without dismay, without thinking of escapeways, without rage, without fear, falling on one’s knees makes sense, getting up, taking one’s hands, crying in Alimonda square… Sorry, in Carlo Giuliani square. | Moi, quand je reviendrai à Gênes, du kiosque de mon p’tit caf’ rituel, l’ancien samovar de la tristesse qui bout à grand feu dans mon souffle cette douleur qui m’a trahi, c’est l’énorme profil de mon deuil c’est mon tourment que je n’ai su cacher, ces larmes que je garde dans moi... et dans un Gênes libéré, sans plus de verroux, sans plus d’effroi sans plus de voies de détresse, sans plus de fureur, sans plus de peur tomber à genoux, ça voudra dire quelque chose, se lever, se prendre les mains et pleurer en place Alimonda... pardon, en place Carlo Giuliani. |